Temps perdu. Quand les États Généraux de la femme, sponsorisés par Elle magazine, ont commencé il y a quelques jours je n’ai pas particulièrement réagi. Il y a tellement d’États généraux qui n’aboutissent à rien que je ne me suis pas particulièrement penchée sur la question. Aujourd’hui je rattrape le temps perdu.
Mardi, un rapport a été rendu à la ministre de la santé Roselyne Bachelot. Les interruptions volontaires de grossesse stagnent à 200 000 par an en France et l’accès à la contraception est limité. J’ai été particulièrement étonnée de voir que la plupart de ces IVG sont pratiquées sur des femmes qui utilisent une contraception. Les adolescentes sont fortement représentées parmi ces femmes qui ont recours à l’avortement. L’explication : un nombre étonnant de jeunes filles pensent qu’elles ne peuvent pas tomber enceinte lors du premier rapport !
Fertilité
Moi qui suis la première à critiquer la forte fécondité de mes compatriotes, je n’en revenais pas. En France, les femmes ont eu leur mai 68. Elles ont brûlé des soutiens-gorge et ont défendu les droits de la femme. Le droit à disposer de son corps comme bon lui semble et avoir accès à la contraception en sont des exemples. 35 ans après la loi Veil, les féministes de la première heure doivent se retourner dans leurs tombes (si elles sont mortes). Trouver aujourd’hui une petite plaquette avec 21 comprimés dans le sac à main d’une femme semble évident.
Mais ce rapport remet tout en question. Que de jeunes filles isolées dans la Sierra Taraumara ne sachent pas qu’elles peuvent tomber enceinte le première fois qu’elles font l’amour c’est compréhensible. Dans un pays imprégné de catholicisme dogmatique, on ne va pas faire des campagnes massives pour la contraception. Ceci ne veut pas dire qu’il y en a pas, l’usage du préservatif masculin est de plus en plus répandu. Si de l’autre côté de l’océan Atlantique il y a tellement de grossesses non désirées c’est parce qu’il y a un manque ahurissant d’information. Le sexe est tabou, et expliquer à une jeune femme comment se protéger passe par une incitation à la débauche. En plus, la contraception n’est pas à la portée de tout le monde.
Manque d’information
Quand je lis que les jeunes Françaises ne sont pas informées et qu’elles n’ont pas l’application pilule (vous savez l’application qui vous rappelle l’heure de prendre la pilule) sur leur I-Phone je comprends l’importance des États Généraux de la Femme. Entre les quotas pour être à la tête d’un grand conseil d’administration et ces résultats, il y a de quoi s’inquiéter. Attention, il ne faut pas dramatiser. En France on peut pratiquer une IVG, en Espagne il faut aller de l’autre côté de la frontière pour éviter d’être lapidée et au Mexique, des femmes meurent tous les ans suite à un avortement pratiqué clandestinement.
Comme avant quoi…
Alors, vous trouverez justifié le fait que j’ai brisé la paix de la rue de la Roquette dans le 11ème. Je me dirigeais vers un magasin avec une copine. En parlant de tout et de rien elle m’a expliqué nonchalamment qu’on ne devrait pas faire autant de chichi à propos des grossesses et de la contraception. Que ça devrait être naturel, comme avant quoi… En racontant une histoire de sa collègue de travail, elle m’a dit que comme elle avait décidé de faire des enfants à quarante ans elle a dû suivre des traitements de fertilité.
Évidemment, cette femme en question a fait un enfant à quarante ans parce qu’elle a décidé d’avoir une carrière. Elle a maîtrisé son corps et elle a fait ce qu’en elle a voulu. Élever un enfant c’est épuisant, il l’est plus à quarante ans mais c’est le choix de cette femme. Ce que ma copine contestait sans le dire clairement, c’est la lutte de plusieurs décennies pour qu’une femme ne soit pas perçue comme une couveuse sur pattes et qu’elle puisse gérer l’EPAD si ça lui chante. C’est une fille de 21 ans qui dit vouloir une carrière ambitieuse mais qui ne semble pas avoir compris qu’on n’est pas encore en droit de tout faire sans subir des conséquences. Elle a aussi compris pourquoi j’ai crié : « Quoi ? ! », et pourquoi tous les passants de la rue se sont retournés. Si ça continue comme ça, Ségolène ne va pas tarder à recevoir un appel de Bachelot pour lui demander qu’elle lui file ses kits contraceptifs.
(07/02/2010)
Une réflexion sur “Contraception choisie”